Le refuge
Je me suis levé tôt pour dire au revoir aux deux demoiselles.
Dans la brume matinale, je devine plus que je ne vois leurs courbes abruptes, taillées au couteau d’une nature toute puissante, mais peu importe.
De ces fidèles compagnes, je sais voir et je sais sentir chaque détour, chaque pente, chaque relief. Les silences et les chuchotis quand l’hiver les pare comme blanches mariées…Les flots de vie, vagissements de lumière au retour du printemps.
Mon regard entoure, souligne, protège.
Dit-on au revoir aux montagnes de la même manière que l’on quitte une femme que l’on a aimée ?
J’ai tiré les rideaux et me suis assis près du poêle en fonte. La pièce est encore pleine de l’odeur des châtaignes grillées du soir.
Ouvrir la trappe. Offrir les écorces brunes au feu mourant. Les entendre crépiter. Se dire que l’on ne refera jamais ce geste simple.
J’ai refermé la porte du refuge et j’ai laissé glisser la lourde clé au fond de ma poche. Mes mains parcourent le mur de pierres brutes et j’écoute une dernière fois le vent chanter aux cimes des arbres.
Serrer fort la clé au fond de sa poche. Sentir la fuite des larmes. Entreprendre sans se retourner la descente vers la vallée….
Texte écrit en atelier d'écriture . Merci La Tartine pour cette jolie rencontre.